Entretien – Ministre de l’Enseignement technique et de la Formation professionnelle

Entretien – Ministre de l’Enseignement technique et de la Formation professionnelle

« Quatorze filières de formation vont bénéficier d’équipements et de constructions spécifiques »

Sur la période 2023-2026, le ministre de l’Enseignement technique et de la Formation professionnelle Kassoum Maman Moctar entend améliorer l’accès à l’enseignement ainsi que sa qualité. Il lancera également un programme d’école de la seconde chance prenant en charge les besoins des jeunes déscolarisés.

Selon vous, aux yeux du chef de l’État, quels sont les défis et les perspectives pour l’enseignement technique et la formation professionnelle ?

Kassoum Maman Moctar : Aux yeux du chef de l’État et en référence au programme de Renaissance acte  II, les défis et les perspectives en termes d’enseignement technique et de formation professionnelle sont importants. En matière de développement de l’employabilité des jeunes, le président de la République part du constat qu’au Niger, des filières métiers connaissent un déficit de jeunes formés pour répondre aux besoins, et qu’il revient donc au système de l’enseignement et de la formation techniques et professionnels (EFTP) de s’atteler à répondre à ces besoins en qualifications de base dans tous ces métiers
où l’on note une plus une faible présence de compétences locales en dépit des investissements consentis
des années durant en EFTP. En matière d’infrastructures et d’équipements, malgré là aussi les investissements, les besoins restent énormes et les réalisations peu lisibles, notamment du fait du saupoudrage. Il s’agira de rationaliser ces investissements et de privilégier le principe de construction progressive de centres entiers, en fonction des ressources disponibles. Par ailleurs, c’est dans cette volonté de rationaliser les dispositifs de formation que nous envisageons, sous le contrôle du président de la République, de ramener le nombre des collèges d’enseignement technique (CET) à des proportions maîtrisables permettant de les rendre plus opérationnels et d’y développer des formations socialement et économiquement rentables.

Quelles résolutions ou décisions ont été prises au profit de la formation professionnelle à l’issue de la rencontre avec le secteur privé que vous avez présidée le 15 novembre 2022 à Niamey ?

Avant de répondre à cette question, il convient de préciser que cette rencontre qu’ont honorée de leur présence le chef de file des partenaires techniques et financiers (PTF) du sous-secteur de l’EFTP, le président de la Chambre de commerce et d’industrie du Niger (CCIN) et différents acteurs de l’EFTP a consisté principalement à poser les jalons d’un partenariat solide avec le secteur privé. En effet, le secteur privé est l’un des acteurs essentiels du sous-secteur car il contribue notamment à l’identification des filières de formation, à l’élaboration des curricula, à l’accueil des jeunes en stage et à leur insertion dans le tissu socioéconomique. En termes d’engagements pris, il faut retenir pour l’essentiel la formalisation d’un cadre de concertation avec le secteur privé à travers un texte portant création, organisation et missions de ce cadre. Par ailleurs, une feuille de route et un plan d’action du cadre seront élaborés pour la mise en oeuvre des actions relatives à la formation continue des travailleurs du secteur privé, à l’apprentissage par alternance, aux stages professionnels des apprenants et à l’accueil en immersion professionnelle des formateurs de l’EFTP.

De 2017 à 2019, des lycées professionnels ont été construits dans les huit régions du pays pour revaloriser la formation professionnelle. Quel a été l’impact de cet effort, et d’autres constructions d’établissements ont-elles été lancées ?

Avant de parler de lycées construits, il faut d’abord souligner que le sous-secteur enregistre aujourd’hui onze lycées professionnels ou techniques dont huit sont construits et trois en voie de l’être à partir de 2023, ce qui contribue significativement à améliorer les conditions d’apprentissage. Á titre d’exemple, les taux de réussite aux examens du baccalauréat session 2022 ont été tirés vers le haut par les résultats aux baccalauréats professionnels, techniques ou technologiques.

De nouvelles filières de formation dans l’enseignement technique et professionnel vont-elles être créées ?

En effet, que ce soit dans les établissements publics ou privés sous tutelle du ministère, le lien avec les besoins de l’économie restera de rigueur, ce qui permettra de mieux contrôler l’ouverture ou la fermeture de filières et d’éviter les saturations préjudiciables. Il me plaît de noter que dans le cadre de l’amélioration des conditions des enseignements et apprentissages, j’ai signé le 17 octobre 2022 un arrêté portant adoption des normes et standards des équipements et constructions spécifiques pour quatorze filières de formation.

Comment comptez-vous renforcer les capacités du Fonds d’appui à la formation professionnelle et à l’apprentissage (FAFPA) ?

Il convient de rappeler d’abord que le FAFPA représente, sous la tutelle technique du ministère, un organe
important de financement des actions de formation au profit des jeunes, avec des ressources provenant de la taxe d’apprentissage, de la subvention de l’État ou des appuis des partenaires. La question que vous me posez me donne ainsi l’opportunité de souligner que la visite de travail que j’ai effectuée le 5 janvier 2023 à la direction générale du FAFPA procédait de cette volonté de l’accompagner et d’en renforcer les capacités pour lui permettre de financer plus les actions de formation au profit des jeunes. Ainsi, outre nos incessants plaidoyers et actions visant à un reversement intégral de la taxe d’apprentissage à son profit, notre volonté est d’accompagner le FAFPA pour la réalisation de son audit organisationnel, ce qui nous permettra de maîtriser les forces et opportunités à consolider ainsi que les faiblesses et menaces à minimiser. Cet audit nous donnera l’occasion de repenser la structure organisationnelle ainsi que le système de collecte et de reversement de la taxe afin de les rendre plus efficaces.

Quelle est votre feuille de route pour 2023 ?

Notre feuille de route pour 2023, première année de mise en oeuvre de la feuille de route 2023-2026 du ministère, porte essentiellement sur de grandes lignes de réformes nécessaires à l’amélioration de l’accès à l’EFTP et de sa qualité. En matière d’amélioration de l’accès, il s’agira de mettre un accent particulier sur le développement de la formation par apprentissage et des formations initiales professionnalisantes (FIP), une modalité de formation qui peut mobiliser des milliers de jeunes. Ainsi, un programme dit d’apprentissage ou école de seconde chance est en voie de concrétisation pour prendre en charge les besoins en formations d’insertion des jeunes déscolarisés ou non scolarisés de toutes les régions du pays. Dans les domaines des infrastructures et des équipements, le ministère mettra fin au saupoudrage et ciblera des centres à construire ou à équiper en entier de façon progressive. En matière de qualité, il s’agira notamment de doter les établissements de nouveaux programmes selon l’approche par les compétences, de mettre en oeuvre les stratégies de formation des enseignants et formateurs, de digitaliser les examens et concours, et enfin de rationaliser les CET en réduisant la carte de leur implantation et en y renforçant tous les déterminants de la qualité des formations.

Propos recueillis par Serge-Henri Malet

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