Les enjeux de la fusion CEMAC-CEEAC
Annoncée depuis dix ans, la fusion entre la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) et la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) devrait voir le jour en 2024.
Lors des assises des premiers états généraux de la CEMAC le 1er septembre dernier à Libreville, au Gabon, la fusion entre la CEMAC (Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale) et la CEEAC (Communauté économique des États de l’Afrique centrale) a été au coeur des débats. Tous les responsables des vingt institutions spécialisées de ces deux communautés ont sollicité un délai supplémentaire de deux ans pour préparer la fusion entre les deux structures, soit six États pour la CEMAC – Congo-Brazzaville, Cameroun, Gabon, Guinée équatoriale, Tchad et Centrafrique – et onze pour la CEEAC – ceux de la CEMAC plus l’Angola, le Burundi, le Congo-Kinshasa (RDC), Sao Tomé-et- Principe et le Rwanda. D’après Mohamadou Lamine, rapporteur des assises et directeur de cabinet de la vice-présidente de la Commission de la CEMAC, cette période de transition permettra de finaliser les diligences entreprises en interne, de faciliter la mise en place de la nouvelle institution, et enfin de recevoir des outils fiables à sa promotion, à son développement et à son épanouissement. Comme l’a précisé l’un des ardents défenseurs de ce rapprochement, le Pr Daniel Ina Onda, président de la Commission de la CEMAC, les réflexions qu’inspirent cette fusion seront transmises aux six chefs États de
la CEMAC : « Je me ferai le devoir de présenter vos doléances aux chefs d’État ainsi que les doléances qui me concernent. Vous ne devez pas avoir peur de la rationalisation que représente cette fusion car de toute façon, les chefs d’État ont déjà pris leur décision, et nous devons nous y conformer ». La CEMAC, qui compte à peine 50 millions d’habitants, constitue la plus petite communauté économique au monde. Dès lors, il semble judicieux de la fusionner avec la CEEAC pour la rendre plus compétitive sur le marché des échanges. La fusion de ces deux Communautés économiques régionales (CER) que sont la CEMAC et la CEEAC bénéficie donc d’une nouvelle échéance portée à deux ans et devrait obéir à un procédé de « fusion par constitution » qui consiste, pour deux entités désignées par A et B, à s’unir pour créer une nouvelle entité C. Cela signifie que la CEMAC et la CEEAC en tant que telles sont appelées à disparaître pour laisser place à une seule et nouvelle entité née de leur union. Le président sortant de la CEMAC a en outre indiqué que cette réforme des CER avait été confiée à l’actuel président en exercice de la Conférence des chefs d’État de la CEMAC, le Camerounais Paul Biya. Plusieurs changements d’importance sont attendus. Alors qu’elle fait face à un énorme déficit d’infrastructures routières, notamment inter-États, l’Afrique centrale pourra avec ce rapprochement espérer dynamiser les relations commerciales intra-régionales en comptant sur le marché de plus de 200 millions de consommateurs que représente cette nouvelle CER dont la superficie sera de 6,7 millions de km2 et le PIB de 523 milliards de dollars, soit 283,280 milliards de FCFA. Ajoutons que l’Afrique centrale, considérée comme la région la moins intégrée du continent, fait les frais de la bipolarisation actuelle entre CEMAC et CEEAC. En effet, elle présente des taux d’échanges se situant en deçà de 3 %, contre une moyenne continentale de 17 %. D’où les espoirs que fait inévitablement naître cette fusion pour une santé florissante du commerce intra-communautaire.
Louise Bibalou-Durand