La transformation de l’économie nigérienne est sur les rails
Déjà deux ans de gouvernance sous l’ère Mohamed Bazoum au Niger. Comment cela se traduit-il sur les plans du dialogue politique, de la croissance économique, de la sécurité ou du secteur de l’éducation ? Il s’en sort plutôt bien pour le moment. Pourvu que ça dure…
Ayant accédé au pouvoir au Niger début avril 2021 à l’issue d’un scrutin présidentiel tumultueux et plein de rebondissements, remporté au second tour face à son challenger Mahamane Ousmane avec le taux confortable de plus de 55,75 % des suffrages, Mohamed Bazoum est à maints égards un modèle de président bien élu étant donné le contexte du moment. En effet, dans le contexte nigérien, son accession au pouvoir est la résultante d’un bon exemple de fair-play politique consacrant la première transmission démocratique du pouvoir entre deux présidents démocratiquement élus depuis que le pays a fait ses premiers pas dans l’ère de la démocratisation. De plus, sur le plan international, son élection a été perçue comme une lueur d’espoir dans un continent africain en proie au phénomène du fameux « troisième mandat » présidentiel en passe d’instaurer une tradition de remise en cause des fondements mêmes de la démocratie avec tripatouillage de la Constitution dans certains pays de la sous-région ouest-africaine. Voilà pourquoi les défenseurs de la démocratie et bien d’autres observateurs avertis de l’évolution de la scène politique ont joint leur voix à celle de la communauté internationale pour célébrer et saluer cette élection matérialisant enfin la première alternance démocratique réussie au Niger en 50 ans. Une véritable prouesse, surtout quand on sait que dans l’intermède de la passation de témoin entre les présidents élu et sortant, une tentative de coup d’État a bien failli gâcher l’aboutissement du processus démocratique en cours dans la nuit du 30 au 31 mars 2021, presque à la veille de l’investiture du président Mohamed Bazoum. Apaiser le climat socio-politique Ayant solennellement promis, lors de son discours d’investiture, d’enfiler le boubou de « président de tous les Nigériens », Mohamed Bazoum a su gagner les coeurs des Nigériens en posant une série d’actes symboliques qui attestent de la volonté manifeste de créer les conditions d’un apaisement du climat socio-politique. C’est ainsi qu’il ouvrit largement les portes du palais présidentiel pour y accueillir à tour de rôle les représentants de toutes les couches socio-professionnelles ainsi que de la classe politique. À tour de rôle, il a engagé des échanges sincères et utiles avec les syndicats, les acteurs des organisations de la société civile, les responsables des différents bords politiques, les chefs traditionnels, les leaders religieux, les associations de femmes et de jeunes, bref, presque toutes les composantes de la nation. À toutes les structures qu’il a rencontrées, le président Bazoum a tenu le même langage de franchise sur l’impérieuse nécessité d’agir dans le sens du renforcement de l’unité nationale, de la concorde, de la cohésion sociale, de la paix et de la sécurité. Il s’agit, pour chaque citoyen, de mettre en avant les intérêts du Niger et de son peuple en privilégiant la saine collaboration, notamment sur certaines questions cruciales comme la sécurité et l’éducation, deux secteurs sensibles malheureusement minés par d’inextricables difficultés. Sur le plan de la sécurité, au regard de la menace que constituaient les attaques sanglantes perpétrées par les groupes terroristes aussi bien au Niger que dans ses deux pays voisins le Mali et le Burkina Faso, il fallait d’emblée créer une atmosphère favorable à la mobilisation de tous les citoyens derrière les forces de défense et de sécurité. Cette vision du nouveau chef de l’État visant à susciter une union sacrée des Nigériens face aux forces du mal a tout naturellement rencontré une forte adhésion dans le pays. Le secteur de l’éducation, en pleine déconfiture au Niger, s’est ausi invité au centre des premières priorités du président Mohamed Bazoum. « Ma conviction intime est que notre pays a devant lui un bel avenir, pourvu que nous soyons en mesure d’apporter les bonnes réponses à ses défis. Pour cela, nous avons besoin prioritairement de faire deux choses : promouvoir une bonne gouvernance et repenser radicalement notre système éducatif dans l’optique de transformer nos actifs démographiques en dividendes économiques », a-t-il indiqué dans son discours d’investiture. Une vision en faveur du secteur de l’éducation C’est ainsi qu’il a exprimé sa ferme volonté d’améliorer le système éducatif et la condition enseignante, des sujets sur lesquels il a largement échangé avec les partenaires sociaux de l’éducation lors d’une rencontre historique au palais de la Présidence. Et, joignant l’acte à la parole, le chef de l’État a lancé un programme de construction d’internats de jeunes filles, l’objectif étant de placer cette frange fragile de la population à l’abri des contingences pouvant compromettre la poursuite de son cursus scolaire. De même, un autre programme de construction de classes en matériaux définitifs a été entrepris afin de remplacer les paillotes devenues dangereuses pour la sécurité des élèves, en témoigne la série d’incendies subis par ce type de classes.
Le Niger étant indexé comme l’un des pays les plus pauvres du monde, l’on ne saurait bien évidemment manquer de jauger son président entrant sur son programme de gouvernance économique. Le président Bazoum le savait. C’est pourquoi, dès le jour de son investiture, il a annoncé les ambitions qu’il nourrit vis-à-vis de ’économie nigérienne. Son objectif, a-t-il précisé, est de porter le taux de croissance annuel du PIB à 8 % et le taux de pression fiscale à 20 %. Il vise aussi à réduire le taux de pauvreté de 43 % en 2022 à 25 % en 2025 et à maintenir le taux d’inflation ainsi que déficit budgétaire global en dessous de 3 %. Succès de la Table ronde de Paris sur le PDES 2022-2026 Mais le Niger peut surtout compter sur les énormes retombées financières de la Table ronde de Paris sur le Programme de développement économique et social (PDES) 2022-2026, avec plus de 45 milliards d’euros annoncés par les investisseurs privés et les bailleurs de fond, soit 150 % des prévisions. De bonnes perspectives pour le pays, si ce n’est qu’il reste au président Bazoum à engager une lutte sans merci contre la corruption, un fléau qui, si rien de très musclé n’est fait, risquerait d’annihiler les grandes opportunités ainsi que tous les efforts de développement du Niger. Ajoutons toutefois pour finir sur une note optimiste que cette gouvernance jouit aussi des avantages liés à la volonté affichée du président Bazoum d’assainir le dialogue entre le pouvoir, les organisations de la société civile et l’opposition politique. La récente libération du général à la retraite Moumouni Boureima dit Tchanga, incarcéré dans le cadre des violences post-électorales, est perçue à Niamey comme un signal fort de cette volonté de décrisper le climat politique.
Assane Soumana