Union pour le renouveau centrafricain – Élection présidentielle: En quête d’alternance

Á nouveau candidat à l’élection présidentielle centrafricaine en 2020, Anicet-Georges Dologuélé, chef de file de l’opposition, va tenter de déjouer dans ce scrutin tous les pronostics défavorables.

Il y a cinq ans, l’opposant Anicet-Georges Dologuélé, leader de l’Union pour le renouveau centrafricain (URCA) et chef de file de l’opposition, était arrivé en tête du premier tour de la présidentielle avec 23 % des voix. Bien évidemment, au vu de ce premier score, il s’imaginait être le président de la République centrafricaine en 2016. Mais tout ne s’est pas passé comme il le souhaitait. En effet Faustin-Archange Touadéra, jouant stratégiquement au second tour la carte du grand rassembleur, a remporté l’élection avec 62,71 % des suffrages, ce qui n’est pas rien. Á l’époque, M. Dologuélé avait dénoncé avec vigueur des fraudes massives en faveur de son concurrent, puis avait finalement dû se raviser et féliciter le vainqueur. Pour cette seconde confrontation, il a de nouveau été désigné par son parti comme candidat à la présidentielle du 27 décembre 2020. Il fera aussi campagne pour les législatives, sachant que l’URCA compte 13 députés dans le Parlement actuel et fait figure de seconde force politique derrière le MCU, le parti au pouvoir, qui totalise 20 députés sur 140 sièges. Ne le nions pas, les pronostics sont assez défavorables au candidat Dologuélé, sa stratégie pour faire pression sur le pouvoir Touadéra n’ayant pas fonctionné. De quoi s’agit-il ? Début juillet 2020, l’URCA a fortement soutenu la société civile dans sa volonté de lancer une « opération ville morte » qui n’aurait pas eu l’effet généralisé souhaité par les organisateurs. En sa qualité de chef de l’opposition, M. Dologuélé a donc écrit au président Touadéra pour lui proposer d’organiser une concertation nationale, accusant l’Autorité nationale des élections (ANE) d’oeuvrer en défaveur de l’opposition. « Mais le président n’a pas donné suite. Nous sommes donc passés à une autre phase », indique-t-il. Cette seconde étape a consisté à réclamer un report des élections qui n’a pas, lui non plus, obtenu gain de cause. Échec aussi de tous les ténors de l’opposition, pourtant réunis au sein de la Coalition de l’opposition démocratique (COD 2020), qui n’ont pas pu s’entendre sur une candidature unique. Et pour ne pas arranger les affaires de l’opposition, la COD 2020 dirigée par l’ancien président François Bozizé, resté au pouvoir du 15 mars 2003 au 24 mars 2013, a du mal à encaisser le rejet par la Cour constitutionnelle de la candidature du même Bozizé relativement au critère de bonne moralité, car le candidat fait l’objet d’un mandat d’arrêt international. Cette décision de la Cour renforce les chances de réélection du président Touadéra et fragilise celles de la COD 2020, où Anicet-Georges Dologuélé reste désormais l’une des plus grosses têtes d’affiche avec d’autres présidentiables comme Catherine Samba-Panza (indépendante), Martin Ziguélé (MLPC) ou Karim Méckassoua (Chemin de l’Espérance)… Une solide équipe de cadres pour diriger le pays Jouissant d’une image de technocrate, cet économiste et banquier qui a occupé des postes de direction à la Banque centrale des États de l’Afrique centrale (BEAC) et dirigé la Banque de développement des États de l’Afrique centrale (BDEAC) est en quête d’alternance politique. Autour de lui, une solide équipe de techniciens et de cadres de haut niveau pour diriger le pays, comme son éminence grise Christian Gazam Betty, jeune entrepreneur formé à l’université des sciences et technologies de Pékin, en Chine, et qui de surcroît possède à Bangui le cabinet de conseil El Shamma Group, spécialiste en communication et en marketing. C’est lui qui a préparé le terrain de son mentor en direction des jeunes. Autre figure, Noël Ngoulo, ancien secrétaire général de l’université de Bangui où il a connu M. Dologuélé,  lors recteur : ce professeur de philosophie formé au Canada est aujourd’hui la cheville ouvrière de l’URCA et l’un des plus proches conseillers de l’opposant. Quant à André Nalké Dorogo, vice-président de l’URCA, son action au Parlement est sans égale. Considéré comme le bras droit de Dologuélé à l’Assemblée nationale, il s’exprime régulièrement au nom du parti. Rappelons qu’il a été ministre des Mines en 2003, puis de la Santé dans le gouvernement Touadéra en 2009, et qu’il est comme Dologuélé un ancien membre du Mouvement de libération du peuple centrafricain (MLPC) actuellement dirigé par Martin Ziguélé.

Enfin, évoquons le rôle joué par Fred Edgard Gassia, d’abord premier président du comité fédéral de l’URCA pour l’Europe devenu par la suite conseiller national politique en charge aussi de la zone Amérique et Asie, un poste qu’il occupe toujours : c’est en partie à lui que l’URCA doit la victoire massive de son candidat en Europe lors de la présidentielle de 2016. En sera-t-il de même pour celle de 2020 ?

À la recherche de soutiens à l’international à l’approche de la présidentielle du 27 décembre 2020, Anicet- Georges Dologuélé a multiplié en octobre dernier les entretiens à Paris lors d’une visite en France. Parmi ses interlocuteurs figuraient notamment Franck Paris, conseiller Afrique d’Emmanuel Macron, et Christophe Bigot, le nouveau patron de la direction de l’Afrique au Quai d’Orsay. Une manière affirmée de montrer où irait son orientation diplomatique s’il était élu, au moment où son pays opère un rapprochement avec Moscou. Une chose est sûre, M. Dologuélé semble déterminé à gagner cette présidentielle. Fera-t-il mentir les pronostics qui disent Touadéra réélu ? Á voir.

Louise Bibalou-Durand

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