Banques - Le seuil des 20 000 milliards de FCFA franchi en Côte d’Ivoire

Une trentaine de banques commerciales se partagent le marché ivoirien. Mais, en termes de parts de marché, elles ne sont pas toutes logées à la même enseigne.

Á fin décembre 2022, le total bilan de l’ensemble des banques ivoiriennes s’affiche à 20 824 milliards de FCFA, soit une hausse de 15,3 % par rapport à 2021, où il s’élevait à 18 061 milliards. Ainsi, il franchit le seuil symbolique des 20 000 milliards de FCFA. La performance s’explique notamment par les bonnes orientations du marché interbancaire, qui enregistre une hausse de 5,99 % en s’établissant à 3 009 milliards de FCFA fin 2022, contre 2 839 milliards fin 2021. Le marché de la clientèle conserve quant à lui son rythme de croissance en enregistrant une hausse de 13,5 %, soit 10 762 milliards de FCFA en 2022. 

L’analyse des parts de marché entre décembre 2021 et décembre 2022 montre que dans le top 5, la Société Générale (SGCI) reste en tête avec un total bilan supérieur à 3 300 milliards de FCFA. Elle est suivie de Banque Atlantique (BACI), qui franchit pour la première fois le seuil des 2 000 milliards de FCFA, soit 10 % de parts de marché. La troisième place revient à Ecobank, qui réalise une belle progression de son total bilan, passé de 1 685 milliards de FCFA en 2021 à 1 900 milliards en 2022, soit une hausse de 12,76 %. Elle est talonnée par NSIA Banque, qui affiche un total bilan de 1 895 milliards de FCFA et une progression de 14,96 %. La médaille d’or revient cependant à la BNI, qui se classe pour la première fois dans le top 5 avec une progression impressionnante de son total bilan de 31,66 % en passant de 1 216 milliards de FCFA en 2021 à 1 601 milliards fin 2022, ce qui représente 8 % de parts de marché. La SIB perd donc sa place de numéro 5 malgré la progression de son total bilan, qui enregistre une hausse de 13,82 %. 

 

Avec une progression de son total bilan de 31,66 %, la BNI se classe pour la première fois dans le top 5. 

 

Comparées aux banques publiques ivoiriennes, les banques privées ivoiriennes ou étrangères se taillent la part du lion (90 %). En effet, les trois banques publiques que sont la BNI, BHCI et Versus Bank ne représentent que 10 % du marché bancaire ivoirien. Ceci paraît logique, dans un certain sens, puisque le banking est généralement l’affaire du secteur privé. Les filiales des banques privées françaises SGCI et BIBICI occupaient naguère à elles seules près d’un quart du marché dans le pays avec environ 20 %. Mais depuis le récent rachat des actions de la BNP-Paribas dans le capital de la BICICI par les établissements publics ivoiriens, il ne reste plus qu’une seule filiale française, la SGCI, qui garde toutefois sa place de leader avec 16 % de parts de marché.

En plus de la SGCI, trois autres banques privées dominent collectivement et individuellement le marché : la BACI, qui engrange 10 % de parts de marché, suivie d’Ecobank et de NSIA BANQUE, ex æquo avec 9 % de parts chacune, soit un total de 44 % à elles quatre. Les parts de marché de toutes les autres banques varient entre 0 et 8 %. On note également que hormis la BNI, les banques ivoiriennes représentent une faible part du marché de leur propre pays. Cette faiblesse des banques proprement ivoiriennes découle du manque ou de l’insuffisance d’investisseurs et autres hommes d’affaires ivoiriens. 

Car bien qu’ayant opté pour un développement économique basé essentiellement sur le secteur privé, l’État de Côte d’Ivoire mène paradoxalement peu de politiques d’incitation et de développement pour l’émergence d’une classe d’investisseurs et d’hommes d’affaires ivoiriens. Ceci explique sans doute que l’économie domestique nationale de façon générale, et le secteur bancaire en particulier, restent largement dominés par le capital étranger. La conséquence logique et inévitable d’une telle situation est la fuite massive, mais licite, des capitaux sous forme de rapatriement de revenus, de bénéfices, etc., qui, autrement, auraient été injectés dans l’économie nationale, soit sous forme de consommation, soit sous forme d’investissements dans différents secteurs d’activité.

 

Edouard M’Bouafouê